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Sugar Man de Malik Bendjelloul

(Attention : Spoilers)

 

     Sugar Man, réalisé en trois ans malgré de très faibles moyens, rapporte la découverte et le succès d'une figure mystérieuse et mythique, Sixto Rodriguez, chanteur étrangement ignoré dans le reste du monde mais qui marqua l'Afrique du Sud et son histoire. Autour de cette homme dont personne ne sait rien, une véritable légende se crée. Les histoires les plus sordides et improbables courent sur sa mort quand deux fans entreprennent une enquête pour lever le voile sur un mythe qui eut une influence considérable et insuffla un vent de révolte durant l'apartheid. Le documentaire suit l'investigation de ces deux passionnés, soutenu par un enchantement et une volonté entrainante, de manière très classique et formel, sans poésie, uniquement portée par leur engouement. Jusqu'à cet instant parfait qui nous permet enfin d'appréhender l'émerveillement qui entoure ce spectre insaisissable mais saisissant : une mélodie à la fois haute et profonde retentit d'une guitare et transporte instantanément le spectateur, jusqu'ici intrigué mais toujours quelque peu somnolent. Et tandis que la mélodie résonne, une voix brute, élevée et limpide, habitée par une sorte de mélancolie, d'expérience, s'élève. La pièce est envahie et bercée par cette voix qui semble flotter et nous plonge dans une rêverie à la fois douce et cruellement réelle. Le film devient dessin animé : un trottoir sale et coloré de banlieue défile, quand apparait une silhouette masculine noire, longue, qui déambule lentement d'une démarche cadencée, presque désarticulée mais fluide. Il s'en dégage une pesanteur, un certain blues qu'on retrouve dans la musique. La caméra continue sa course et dépasse ce curieux automate qui n'est autre que la parfaite illustration de Sixto Rodriguez dans toute sa singularité. Et à plusieurs reprises différents morceaux de Rodriguez viendront bercer, animer, émouvoir le documentaire définissant encore et encore un personnage indescriptible dont nos deux enquêteurs retrouvent la trace et qui, s'il se livre à une interview, ne perd jamais de son mystère et de son aura. C'est justement ce défi périlleux que relève avec brio Malik Bendjelloul: il décortique un mythe sans lui faire perdre une once de sa magie et offre une fabuleuse découverte au spectateur, qui sitôt sorti de la salle s'empresse de partir à la recherche de ces perles musicales, encore bercé par leur intensité. 



12/06/2013
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